Vous envisagez d’anticiper le marché?

Principaux points à retenir :

  • Il est difficile de prévoir les fluctuations du marché et ce n’est pas le type de comportement que nous encourageons pour la plupart des conseillers et des investisseurs.
  • Une perspective historique sur la fréquence à laquelle les portefeuilles ont perdu de l’argent peut aider les investisseurs à demeurer investis.
  • Nous proposons également quelques considérations clés à aborder avec les investisseurs qui envisagent de se tourner vers les liquidités.

Au cours des dernières semaines, combien de fois avez-vous répondu à la question « Devrais-je passer aux liquidités? ». Ou peut-être la question a-t-elle pris la forme d’une déclaration audacieuse (affolée?) : « Je dois passer aux liquidités ».

Nous avons certainement constaté une augmentation de ce sentiment en raison de l’accroissement de la volatilité des marchés depuis le début de l’année.

Les investisseurs frileux regardent les taux actuels des certificats de placement garanti (CPG) et se disent qu’un rendement de 3 à 4 % semble plutôt attrayant par rapport à une correction du marché.

Voici donc la question qui se pose : les investisseurs devraient-ils abandonner leurs expositions à long terme pour se tourner vers la sécurité des liquidités, dont le potentiel de rendement est certes limité? Il n’a jamais été facile d’anticiper correctement les marchés, mais est-ce différent cette fois-ci?

Mettons les émotions de côté un instant et examinons la situation d’un point de vue historique pour aider les investisseurs qui se débattent avec l’idée de sortir du marché.

Ce à quoi il faut penser

Avant d’envisager de se tourner vers les liquidités, les investisseurs doivent évaluer quelques facteurs:

  • À quelle fréquence les marchés et les portefeuilles sont-ils devenus négatifs… et sont restés négatifs?
  • Quel est votre degré de confiance quant au « signal de vente » et que ressentirez-vous si vous vous trompiez?

Il est vrai que les marchés financiers connaissent des périodes de forte volatilité et produisent actuellement des résultats négatifs pour les investisseurs. Toutefois, ces périodes ont tendance à être de courte durée et à s’inverser plutôt rapidement, comme le montrent les résultats de l’année civile présentés ci-dessous. Cet histogramme montre qu’au cours des 55 dernières années, un portefeuille équilibré composé à 60 % d’actions et à 40 % de titres à revenu fixe n’a produit des résultats négatifs qu’au cours de sept de ces années. En d’autres termes, un portefeuille équilibré a enregistré des résultats positifs au cours de 46 des 55 années civiles (84 %). Les années les plus négatives, telles que 2008 et 2022, ont été suivies d’années très positives.

De plus, au cours des 45 dernières années, il n’y a eu que quelques rares cas où les rendements négatifs des investisseurs se sont prolongés au-delà de 12 mois. Il est difficile d’essayer d’anticiper correctement et de manière cohérente ces périodes étroites de résultats négatifs.

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Marginal income tax rates

Source : Morningstar Direct. Portefeuille indiciel 60/40 : 20 % actions canadiennes, 40 % actions mondiales et 40 % obligations canadiennes. Actions canadiennes : indice composé S&P/TSX; Actions mondiales : indice MSCI Monde hors Canada; Obligations canadiennes : indice obligataire à long terme FTSE Canada (1970-1979), indice obligataire universel FTSE Canada (1980-2023). Le rendement de l'indice représente le rendement passé, ne garantit pas le rendement futur et n'est pas représentatif d'un placement précis. Les indices ne sont pas gérés et il n'est pas possible d'y investir directement.

Pour répondre à l’argument « certes, la fenêtre est étroite, mais c’est un signal de vente évident », passons en revue quelques signaux historiques qui constituaient des avertissements de vente « évidents » et leurs résultats éventuels.

Dans tous les cas, nous utiliserons les indices du marché américain comme références pour les marchés mondiaux.

Signal d’anticipation de marché – Pièce A : La pandémie mondiale

Le signal de vente le plus récent a été la pandémie de COVID au début de l’année 2020.  L’économie mondiale fut paralysée et les perspectives boursières se sont rapidement assombries.  La bourse a commencé à reculer en février et à la fin du premier trimestre, les actions avaient chuté de plus de 20 %. Face à tant de facteurs inconnus, de nombreux investisseurs craintifs se sont retirés et ont mis leurs liquidités sur la touche.  Malheureusement, ces investisseurs ont manqué une grande partie, voire la totalité, du rebond du marché qui a suivi le creux de la vague, les actions ayant progressé de 45 % au cours des neuf derniers mois de l’année. L’année de la pandémie de COVID a été marquée par un rendement boursier de plus de 20 %!

Comment une pandémie qui se produit une fois tous les cent ans et qui a provoqué un taux de chômage historiquement élevé et une récession mondiale pourrait-elle ne pas être un signal de vente?  Ce ne fut pas le cas, et en réalité, le rendement boursier de plus de 20 % en 2020 a été suivi d’une année 2021 qui a produit un rendement de plus de 25 %. Tous ceux qui ont interprété la pandémie comme un « signal de vente » évident en retirant leur argent du marché boursier ont manqué des rendements robustes pour leur portefeuille.

Signal d’anticipation de marché – Pièce B : La faillite de Lehman Brothers en septembre 2008

Vous vous souvenez de la grande crise financière? À l’époque, lorsque Lehman Brothers a déclaré la faillite de manière inattendue, il s’agissait sans aucun doute d’un signal de vente. Mais l’était-ce vraiment?

Les investisseurs qui ont été confrontés à la faillite et ont décidé de se retirer du marché le 30 septembre 2008 ont manqué un gain de 4,4 % au cours des 12 mois suivants (jusqu’en septembre 2009). Il est vrai que le marché des actions a connu un recul important au cours de cette période, mais les investisseurs qui sont restés investis ont profité de la reprise du marché en 2009. Bon nombre des investisseurs qui se sont retirés après la faillite de Lehman sont restés trop longtemps à l’écart et n’ont pas profité de la reprise historique.

Signal d’anticipation de marché – Pièce C : L »inversion de la courbe de rendement

L’inversion de la courbe de rendement est un « signal » de marché qui se produit plus fréquemment qu’une pandémie mondiale ou qu’une crise économique historique. Ce phénomène est principalement associé à la prévision d’une récession économique, mais les récessions et les corrections de marché ont tendance à aller de pair.

Ce « signal » a retenti cinq fois entre 1980 et 2019 et, à chaque fois, une récession s’en est suivie, généralement accompagnée d’une correction importante des actions. Ces récessions ont eu lieu entre cinq et 24 mois après l’inversion initiale de la courbe, et même pendant les récessions, les marchés connaissent souvent des périodes de rendements positifs qu’il ne faut pas manquer.

Par conséquent, une courbe de rendement inversée n’est peut-être pas un signal immédiat pour le marché, même si elle peut servir d’avertissement de récession.  En fait, les résultats historiques actuels suggèrent que l’inversion de la courbe de rendement pourrait ne pas constituer un signal d’alerte du tout.

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Marginal income tax rates

Source: Bloomberg, FTSE
Remarque : Analyse hypothétique fournie à titre indicatif uniquement
Portefeuilles diversifiés : Deux portefeuilles indiciels composés de l’indice Russell 1000 (R1000) et de l’indice Bloomberg Barclays U.S. Aggregate Bond (AGG); 30 % d’actions : 30 % R1000/70 % AGG, 50 % actions : 50 % R1000/50 % AGG, 70 % actions : 70 % R1000/30 % AGG

En moyenne, les périodes mesurées ci-dessus suivant les inversions ont produit des rendements positifs. Les six premiers mois ont généralement produit des résultats supérieurs à la moyenne, ce qui n’est guère un indicateur pour « sortir » du marché. Au-delà d’un an, les rendements des actions et des obligations sont généralement positifs. Les répartitions plus prudentes donnent de meilleurs résultats sur trois ans, tandis que les portefeuilles plus offensifs donnent de meilleurs résultats sur cinq ans. Cela s’explique probablement par le fait que les obligations bénéficient d’un coup de pouce intermédiaire après l’inversion, les taux d’intérêt étant abaissés pour lutter contre le ralentissement économique, alors que les actions reculent en raison de ce même ralentissement économique. Quoi qu’il en soit, les portefeuilles indiciels hypothétiques semblent se redresser rapidement et afficher en moyenne des résultats positifs à la suite des inversions de la courbe de rendement.

La pandémie mondiale et la faillite de Lehman Brothers, ainsi que les scénarios d’inversion de la courbe de rendement, tous des signaux de vente « puissants », ne sont que deux exemples qui montrent qu’il peut être difficile de déterminer le moment opportun pour effectuer des mouvements de trésorerie en fonction des événements économiques ou de marché. Les conditions ou les événements que les investisseurs peuvent considérer comme des signaux clairs de « sortie » peuvent être plus opaques qu’on ne le pense

En conclusion

L’augmentation récente de la volatilité des marchés semble avoir suscité des questions sur la possibilité de sortir du marché pour se réfugier dans les liquidités. Nous déconseillons à la plupart des investisseurs de tenter d’anticiper les mouvements du marché, car cette décision n’est souvent pas récompensée. Si les investisseurs n’en tiennent pas compte et insistent pour « faire quelque chose » face à la perception d’un risque croissant, vous pourriez les convaincre de réduire temporairement leur exposition au marché.

Une réduction de 10 à 20 % de la répartition en actions peut fournir une marge de manœuvre supplémentaire si le marché se replie, tout en permettant une participation si les marchés se redressent rapidement ou s’ils ne se replient pas du tout.

Une dernière considération pour ceux qui envisagent cette voie est de documenter les raisons de la sortie et le catalyseur qui a motivé le retour. Ces décisions sont souvent motivées par les émotions et non par une perspective à long terme. Le fait de disposer d’un plan écrit peut donc contribuer à améliorer les chances de succès ou à atténuer les dommages causés par une mauvaise décision.